"Le changement est mené par les acteurs et nous impulsons une dynamique et des orientations"

Covid, lutte contre le gaspillage, intelligence artificielle, … la filière de l’événementiel professionnel est confrontée à de nombreux challenges ces dernières années. A Nantes, le Bureau des congrès a opéré un virage à 180 degrés pour répondre à ces nouveaux défis. Rencontre avec Olivier Le Floch, directeur du Bureau des congrès depuis 5 ans.
Face aux bouleversements auxquels la filière de l’événementiel a été confrontée ces dernières années, comment le Bureau des congrès de Nantes Saint-Nazaire s’est mis en ordre de marche ?
Organiser un événement professionnel soulève aujourd’hui un certain nombre de questions en termes de transition écologique et sociale qui n'existaient pas vraiment auparavant.
Notre premier acte saillant a été de relever le défi du gaspillage alimentaire en élaborant « une charte de lutte contre le gaspillage alimentaire ».
C'est un élément visible, concret, et qui est l'aboutissement d'un travail collaboratif de deux ans entre les acteurs publics et privés. Cette démarche structurée, menée à la suite d’une opération de grande envergure sur la pesée des déchets alimentaires sur une dizaine d’événements notamment, a été perçue comme une grande avancée au niveau local, mais a fait des émules bien au-delà.
Cette démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire intéresse aussi d’autres destinations ….
En effet, comme ce dispositif n’avait pas été expérimenté ailleurs, les institutions de la profession, les réseaux professionnels, les collectifs divers et variés, en lien avec le tourisme d'affaires, se tournent aujourd’hui vers nous et nous sommes heureux de pouvoir en faire profiter un maximum de destinations. Cette charte détaille un certain nombre d'actions concrètes qui pourra être décliné sur d’autres territoires. L'idée, ce n'était pas de jouer uniquement pour notre chapelle, mais de contribuer à la transition de la filière, qui forcément, est l’une des plus génératrices d'externalités négatives.
Il est vrai qu’à Nantes, les professionnels ont été très moteurs dans la démarche…
Une vingtaine d’adhérents ont travaillé concrètement à la mise en place de la démarche. Puis dans un 2e temps, nous sommes fiers d’annoncer que 100% des 95 adhérents du Bureau des congrès ont signé la charte en janvier 2025. Si bien que même un prestataire apparemment moins concerné, comme un photographe, est prêt aujourd’hui à se mobiliser et à s’engager contre le gaspillage !
L’événementiel professionnel est une filière en pleine mutation…
Les évolutions de l’événementiel professionnel se situent à plusieurs niveaux et c’est dans un contexte plus global que nous sommes sollicités par d’autres territoires comme La Rochelle, Vannes ou Saint-Étienne, pour ne citer qu'eux, qui ont entendu parler de Nantes en termes de modèle vertueux, et ont envie de s’en inspirer. Nous avons d’ailleurs monté un collectif des Bureaux des congrès de l’Ouest pour avancer ensemble sur tous ces sujets.
Comment avez-vous structuré ce bureau des congrès pour qu’il accompagne ces mutations ?
Nous avons mis en place une gouvernance ouverte, nous avons créé des packs d'adhésion répondant aux besoins des adhérents, nous avons élaboré un plan d'animation du réseau différenciant, et enfin des feuilles de route pour les représentants des collèges avec des mandats de 2 ans et des actions concrètes au bénéfice de leur collège.
Ces 4 actions prioritaires constituent notre marque de fabrique.
A Nantes, le changement est mené par les acteurs et le Bureau des congrès impulse une dynamique et des orientations. La clé du succès, c'est qu'il y a un mix public-privé, que l'ensemble de nos décisions et des orientations sont validées par nos adhérents. On peut même dire qu’on a été dépassé, et que les feuilles de route des collèges sont allées bien au-delà de nos attentes. Avec un nouveau chantier sur les conditions générales de vente commune, par exemple.
89% des professionnels de l'événementiel considèrent que la RSE est importante ou très importante pour leur entreprise. Or seulement 40% des organisateurs d'événements intègrent ces critères RSE dans leur processus de sélection de lieux, selon une étude menée par l'agence événementielle Green Événements. Comment faire pour convaincre les organisateurs d’événements ?
Je pense que la puissance publique a un rôle à jouer pour faire évoluer la filière. Mais ce mouvement doit être opéré avec les acteurs de la filière. Pour ce faire, nous allons créer un 6e collège pour les annonceurs à partir du mois de janvier. Il réunira les décideurs représentatifs du panel d'événements, organisateurs de salons, de congrès, d'événements d'entreprise, de séminaires, événements scientifiques, événements sportifs. L’objectif est qu’ils nous challengent sur notre feuille de route en tenant compte de leurs problématiques en tant qu'organisateurs d'événements, mais aussi qu’ils « bifurquent » dans l'organisation de leurs événements. On ne veut plus demain avoir une banque qui organise une convention pour ses collaborateurs et que le buffet est ostentatoire avec du gaspillage alimentaire. Et la banque n’en veut plus non plus. Donc c’est gagnant-gagnant.
Ensuite, demain, le Bureau des congrès sera beaucoup plus sélectif dans le conseil et dans l'orientation des cahiers des charges. Nous serons plus exigeants sur des problématiques de transition. Cela doit passer par plus de pédagogie dans la démarche commerciale, pour amener progressivement les organisateurs à se poser des questions qui ne se posaient pas. La dynamique de transitions doit venir de l'offre et pas de la demande.
Quelles sont les prochaines étapes que vous vous fixez pour 2026 ?
Premièrement, le Bureau des congrès doit être à côté des acteurs en difficultés. Nous recevons des signaux d'alerte de beaucoup d'acteurs qui pourraient fermer leurs structures, ou qui sont en souffrance. Le premier défi sera donc de continuer à accompagner cette filière et la maintenir en dynamique, parce qu'elle est profitable au territoire, elle est génératrice de beaucoup de retombées économiques, mais aussi sociales.
Néanmoins, il nous faut garder notre cap sur les transitions. Nous allons continuer à travailler main dans la main avec les acteurs privés et les acteurs publics, pour dessiner ensemble un chemin de mutation nécessaire. Pour ce faire, nous montons un atelier d’intelligence économique avec les acteurs. Nous allons, avec les acteurs, imaginer le Bureau des Congrès tel qu’il pourrait être dans 15 ans.
L’inclusion est également un sujet clé que nous souhaitons porter : nous venons de constituer un groupe de travail pour faire avancer les réflexions et mettre en place des actions concrètes pour rendre nos événements plus inclusifs.
Enfin début 2026, nous allons intégrer le G8 des destinations françaises. L’objectif est d'aller se nourrir au contact de destinations plus matures encore que nous sur ces sujets de transition afin de pouvoir, avec la force d'un collectif, porter une voix au niveau des organisateurs d'événements, au niveau national. C’est important d’échanger avec des destinations parfois plus aguerries que nous, comme Bordeaux et Lyon.